Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/303

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un tempérament critique de premier ordre, donc, comme on dit outre-Rhin, essentiellement objectif. Et c’est une garantie que nous ne trouvons pas, j’entends au même degré, chez tous les écrivains bretons.

« Il ne faudrait jamais dire l’Espagne, mais les Espagnes », observe quelque part Barrès. Peut-être aussi devrait-on dire les Bretagnes et non la Bretagne. Il apparaît bien tout au moins qu’il y a presque autant de Bretagnes que d’écrivains bretons et qui toutes sont vraies d’ailleurs par quelque côté. La Bretagne, en somme, est un « état d’âme » et il n’est que de choisir, entre tant d’effigies, celle qui correspond le mieux aux nuances de notre sensibilité. Du moins est-ce ainsi que je m’explique qu’entre tant de livres publiés sur les « pardons », et dont l’un pourtant est un pur joyau littéraire, le probe Breton mais sans grande ouverture, qu’était François-Marie Luzel ne celât pas sa préférence pour la Bretagne qui croit de Louis Tiercelin. C’est qu’une certaine roideur puritaine lui était restée de ses longues controverses avec les diascévastes armoricains : le tour d’imagination palingénésique, dont il avait observé les premières manifestations chez La Villemarqué et qu’il retrouvait dans la nouvelle école, effrayait quelque peu, je pense, son réalisme appliqué, scrupuleux et terre-à-terre ; il ne devait supporter qu’avec peine cet élargissement prodigieux de l’humble conscience indigète ; fermé à toute symbolique, il ne voyait point ou ne voulait point voir au-delà des faits et s’irritait, comme d’une déformation, de toute glose qui n’était qu’éloquente ou pittoresque.

Je crois pourtant, et bien que le livre de Jean des Cognets ne se défende à l’occasion ni du pittoresque, ni de l’éloquence, que D’un vieux Monde eût trouvé