Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/347

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Purgatoire qui, cette nuit, viennent s’y promener pour revoir leurs pénates et demander des prières.

Qu’on ait recours à saint Yves pour obtenir vengeance, je l’ignore : il est certain qu’on n’a jamais présenté au recteur de Trébeurden des honoraires pour pareille intention. Je sais qu’on va jeter des morceaux de pain dans la fontaine de Saint-Efflam de Plestin, pour découvrir le coupable ; qu’on admet volontiers les guérisons par oraison, ou par la pose d’une fiole, remplie d’une eau mystérieusement composée, sur la tête, quand on croit avoir le mal, comme on dit, du soleil ; qu’on ne nie pas l’existence des revenants, des lutins, de l’agrippa, du sort, du maléfice, d’une herbe qui fait perdre la route, des intersignes, de la charrette de la mort, de la buandière de nuit, du siffleur de nuit, du Juif errant ; qu’il est bon de tourner le sas ; que le nouveau fiancé doit poser un genou sur le tablier de sa future ; qu’il y a moyen de faire que des jeunes gens s’entr’aiment ; qu’il y en a qui peuvent arrêter le feu, le sang, se rendre loups, faire boiter les animaux.

Je sais que plusieurs ne voudraient point se marier le mercredi, le vendredi ou le samedi, ou dans le mois d’août ; qu’on observe bien les cierges allumés devant les nouveaux mariés, pendant la noce. Il y en a qui ne veulent pas voir une femme entrer chez eux après ses couches, sans qu’elle ait été à l’église, et bien des femmes crèveraient de froid dans le portail plutôt que d’entrer dans quelques maisons.

Plusieurs pensent qu’il y a deux espèces de Saint-Chrême : l’un pour les garçons, l’autre pour les filles. J’aime à croire que le nombre est petit de ceux qui pensent qu’ils sont malheureux dans la journée,