Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/387

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recueil de biographies gauloises qui vaudrait le De Viris illustribus ? »

On le pourrait fort bien en effet et même on le devrait, mais il faudrait composer ce recueil avec des textes latins ou grecs, car nous n’avons pas un seul texte gaulois à mettre aux mains des élèves. Nous sommes des Celtes, oui, mais des Celtes latinisés. Ni Moreau-Christophe, ni M. Schuré, ni encore moins les rédacteurs de la Revue des Nations et les membres de la Ligue Celtique n’y ont suffisamment réfléchi.

J’entends bien que toute cette campagne est dirigée contre notre éducation latine. Il s’agit de rompre avec Rome et Athènes, de répudier tout le passé de notre race jusqu’à Jules César ou au moins jusqu’à la Renaissance, de dénoncer le long travail de fusion d’où est sortie l’âme française, héritière de l’âme antique, pour la replonger dans le chaos des origines.

Mais quel est ce vain effort auquel on nous convie ? Laissons de côté les Bretons qui parlent un idiome à part ; encore cet idiome n’est-il pas l’ancien gaulois, mais une déformation du welche. Que les Bretons conservent cependant leur langue, je le veux bien, je le souhaite même ardemment. Mais allez-vous forcer tous les autres Français à apprendre cette langue ou à rétrograder jusqu’à l’ancien gaulois dont nous ne possédons d’ailleurs qu’un petit nombre de mots ?[1] Non, n’est-ce pas ? Que vous le vouliez ou non, vous continuerez de parler le fran-

  1. Ceci n’est plus tout à fait exact et, dans son beau livre : la Langue gauloise (1921), M. Georges Dottin, doyen de la Faculté des Lettres de Rennes et membre correspondant de l’Institut, a pu recueillir un millier de mots gaulois authentiques. Et, si copieuse