Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/98

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couchant et qui laissent derrière eux un sillage parfumé ; solidement établie dans ces paysages arcadiens, j’aperçois une race forte, bien découplée, haute de stature, régulière de lignes, indemne de tares… Santé, richesse, aptitude au progrès économique, combinée avec l’attachement à la tradition, parfait ! accord de l’individu et de son groupe, de l’homme et du sol, qu’est-ce donc que tout cela, si ce n’est pas le bonheur ?

Et je crois bien, en effet, que les Plougastélois sont des gens heureux. Ils portent, comme on dit, leur bonheur sur leur figure ; ils sont gais, ouverts, d’humeur accueillante et facile ; ils dessinent, au milieu de la mélancolique Bretagne, comme un îlot d’optimisme. C’est, sans doute, qu’un ensemble de conditions naturelles aussi favorables s’est rarement rencontré : Cambry, qui visita Plougastel à la fin du XVIIIe siècle, l’appelait un paradis et souhaitait d’y finir ses jours ; mais c’est surtout que ces gens-ci sont merveilleusement équilibrés. Leur immobilité n’est qu’apparente. À l’écart des autres peuplades de la Cornouaille et du Léon, repliées sur elles-mêmes ou emportées par un vent d’anarchie, la peuplade plougastéloise n’a pas cessé un moment de poursuivre sa lente et régulière évolution. Il n’y a pas eu chez elle de déchirure ; elle n’a pas brutalement rompu avec le passé ; elle s’est développée selon l’harmonieuse logique de ces beaux arbres dont la ramure ne cesse de monter et de s’étendre, tandis que, par leurs racines, ils plongent plus profondément dans le sol maternel.