Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/125

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un bâton blanc à la main, tu marchais vite, il faisait presque nuit déjà ; une femme qui te connaissait t’arrêta sur la route et de la lande où j’étais, par-dessus les ajoncs, j’entendis qu’elle te demandait où tu allais si tard. Et je me souviens que tu lui répondis : « Ne m’arrête pas, je suis pressée. Il faut que je sois avant demain matin à la chapelle de l’Assignation ; c’est au sujet d’un homme qui a fait un faux serment en justice afin de ne pas restituer l’argent qu’il devait… » Et tu continuas de marcher dans la nuit ; mais tes paroles ne m’ont point quittée depuis lors. J’ai su seulement que tu t’appelais Catherine Prunennec, que tu habitais en Servel et que tu étais mendiante de paroisse. Mais si tu n’es que mendiante, cependant, où as-tu trouvé tant d’argent pour fournir aux pèlerinages et quel tort un faux serment a-t-il pu causer à tes affaires, puisque tu vis seulement de la charité des autres ?…

La mendiante regarde Coupaïa, et, comme si ce regard, long et appuyé, lui avait fait voir bien à fond dans la conscience ténébreuse de son hôtesse, elle dépose son sac, s’approche de Coupaïa et la touche à l’épaule :

— Tu en veux à quelqu’un aussi, toi, ma fille !