Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/126

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Coupaïa tressaille et se tait.

— Est-ce à un homme ? Parle-moi franchement…

Mais Coupaïa garde son secret ; elle ne l’a dit encore à âme qui vive qu’à Salaün ; elle ne répond rien à la vieille, et celle-ci continue après un silence :

— Tu te défies, tu as peur, mais c’est que tu ne connais pas bien Cato Prunennec. Va-t’en à Servel, ma fille ; interroge ceux de mon âge, ils te diront qui je suis : à présent, certes, une mendiante de paroisse comme toutes les autres, mais ma condition a bien changé depuis quelques années… Quand tu m’as vue, ce soir d’hiver, sur la grande route de Tréguier, ma baguette blanche à la main, qui me hâtais vers Saint-Yves-de-Vérité, j’étais encore pèlerine de mon métier. Que de chapelles et d’églises j’ai visitées ainsi, non pour moi, quoique je sois pieuse dans le fond du cœur et attachée aux pratiques de ma religion, mais, comme tu le disais tout à l’heure, ma fille, je n’aurais point trouvé l’argent nécessaire à tant de pèlerinages, si je les avais accomplis à mon compte. D’autres m’en chargeaient : des invalides, des femmes aux approches de leur terme ou des hommes