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Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/156

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vois toujours, dans mes souvenirs d’enfance, accoutré en lieutenant de louveterie ; qui, sous la casquette du veneur, forçait la grosse bête dans les halliers de Coatfrec et de Trédez et qui, sous la toque du robin, l’aidait à s’évader du maquis de la procédure. Il terrorisait son auditoire par ses éclats de voix, ses roulements d’yeux, son masque flamboyant, et, dans ses péroraisons, tel un Jupiter tonnant métamorphosé en Jupiter imbrique, noyait sous un déluge de larmes les résistances qu’il n’avait point pulvérisées. Les accusés savaient bien ce qu’ils faisaient en chargeant Me Lebrun de leur défense ; ce Lachaud de sous-préfecture remporta en l’occurrence le plus beau de ses triomphes oratoires : Yves-Marie et Marguerite G… furent acquittés.

Mais l’enquête et les débats révélèrent à leur charge de singuliers agissements.

Marguerite et Yves-Marie G… tenaient à Hengoat, presque en face de l’église, dans une maison du dix-septième siècle appartenant à leur frère et que celui-ci devait leur reprendre à la Saint-Michel, un commerce de boissons dont certaines dépositions donneraient à penser qu’ils étaient les meilleurs et à peu près les uniques clients : on ne s’achalandait guère chez eux que de tabac ; la femme était une « harpie », l’homme un « envieux » et un « sournois »[1]. La maison, restaurée dernièrement, n’a plus guère de remarquable que les blocs cyclopéens qui forment l’entourage de sa grande

  1. Dépositions des témoins.