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Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/16

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Pourquoi s’être révoltée la veille ? Ne connaissait-elle pas son mari jusqu’au tréfonds ? N’avait-elle pas exploré tous les coins et recoins de cette pauvre tête d’homme, si faible à sa passion qu’il y succombait toujours ? Les premiers temps, elle l’avait prié, supplié, puis injurié, battu, traîné par les cheveux sur la grève, où elle le consignait des nuits entières. Et sachant vains les efforts, inutiles les récriminations et les coups, elle le laissait aller maintenant et se taisait, résignée.

L’homme reprit, plus bas :

— Tu n’as pas été chez Louis ?

Elle fut saisie du même frisson que la veille, au nom du douanier. Elle regarda son mari avec la même flamme dans les yeux ; puis, comme si elle abandonnait définitivement toute résistance, elle baissa la tête et répondit d’une voix presque douce :

— Non, tu sais bien que je n’aime pas à me trouver avec ton frère.

— Veux-tu que j’aille lui parler ? dit l’homme.

Elle ne répondit point sur l’instant. Dans cette âme sombre et desséchée, il n’y avait plus de vivant que la haine, une haine âpre