Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/35

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III


La nuit était tombée ; la marée descendait. Coupaïa, lasse d’attendre, franchit la chaussée et courut à Landrellec. On y avait bien vu Salaün dans la matinée, mais on ne savait pas ce qu’il était devenu. Une petite fille lui assura qu’il avait pris vers Roscané, qui est un hameau voisin ; elle demanda s’il portait un pain et, comme l’enfant répondit oui, elle fronça les sourcils et soupira.

Elle s’était complu à l’idée que Thomassin ne les secourrait pas, peut-être rudoierait Salaün, le chasserait comme un mendiant. Ah ! s’il avait pu les traiter ainsi ! Sa haine, cette haine sourde et ténébreuse où elle s’abîmait des journées entières, c’est en elle et d’elle qu’elle vivait. Du pain, on en trouve toujours. Pain de la pitié, plus amer à sa bouche que le chiendent, s’il avait fallu qu’elle le quêtât, elle eût été, suppliante, pieds nus, la parole