Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/51

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— Tu parles par sentences… comment pourrais-je t’entendre ? Explique-toi…

— À Keraliès, dans le manoir, cherche bien, il y a un autre cœur qui languit…

— Francésa ?

La vieille ne répondit pas. Le douanier, les yeux à terre, gonflé d’émotion, attendait. Il releva les yeux ; la vieille n’était plus là. Mais au même endroit, le lendemain, il la revit. Entre les tiges sèches des ajoncs, courbée en deux, elle cherchait de petites salicaires à fleurs jaunes qu’elle étêtait à mesure, n’en conservant que la tige et les racines. Thomassin courut à elle :

— Ah ! mâm-goz, par pitié, dis-moi ce que tu sais !

Et elle répondit :

— Tu souffres donc bien, Loïz-ar-béo ?

— Je ne vis plus.

— C’est comme l’autre, dit-elle tout bas. Ils s’aiment et ils se taisent.

Sur la lande, un vent d’ouest courait, très doux, et dont frissonnaient longuement les ajoncs. Elle tendit l’oreille.

— Le vent vient du manoir, filleul. Il a passé sous les châtaigniers de Keraliès et il a