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xiv notice biographique  

venture est une merveille ? Qu’est-ce que l’homme qui a atteint les bornes de la terre à l’orient et à l’occident ? Qu’est-ce que l’âme ? S’il répond de telle et de telle manière, il est réellement un prophète, sinon il est un imposteur. » Les députés, de retour à la Mecque, posèrent à Mahomet les trois questions ; il promit de répondre le lendemain, mais comme il avait oublié d’ajouter s’il plaît à Dieu, Dieu l’en punit et lui fit attendre quinze jours la révélation. Enfin, au bout de ce temps, il répondit par les histoires des Sept dormants et d’Alexandre le Grand, (chapitre XVIII). Quant à la question relative à l’âme, il répondit fort à propos que Dieu seul savait ce que c’était[1]. C’est ce triomphe de Mahomet sur les incrédules, disent ses historiens, qui mit le comble au dépit des Koreïchites, et ils défendirent à tout le monde d’écouter les prédications du prophète. Les mesures de rigueur prises contre les sectateurs du nouveau culte forcèrent bientôt (ce fut dans la cinquième année depuis la mission de Mahomet, 615 de J.-C.) un certain nombre d’entre eux à quitter la Mecque et à se réfugier en Abyssinie. Là, ils furent reçus avec bienveillance par le roi d’Abyssinie, qui était chrétien. Une seconde émigration suivit bientôt la première ; ces deux émigrations ne se montaient en tout qu’à cent quinze personnes des deux sexes. Les Koreïchites envoyèrent en Abyssinie une députation pour demander l’extradition de ces émigrés ; mais le roi d’Abyssinie s’y refusa en s’exprimant avec éloge sur leur conduite et en des termes qui d’après les récits des musulmans pouvaient passer pour une preuve de son penchant secret pour l’islam.

Le parti du nouveau culte fut inopinément renforcé à cette époque par l’accession d’un homme qui a acquis depuis une grande célébrité dans les annales mahométanes, et qui contribua plus que tout autre à sa propagation. Ce fut Omar, fils de Khattab, très-hostile d’abord comme son père à Mahomet, et redoutable aux musulmans à cause de son courage et de sa violence. L’islam avait trouvé accès dans sa famille, surtout auprès des femmes ; sa sœur Fatima était du nombre, mais la crainte de son frère l’engageait à ne lire le Koran qu’à la dérobée. Un jour Omar la surprend dans cette lecture, et emporte par la colère la blesse ; mais s’adoucissant tout à coup à la vue du sang de sa sœur, il se fait montrer quelques feuillets épars du Koran ; il est saisi d’admiration et d’attendrissement et se rend aussitôt auprès de Mahomet pour faire entre ses mains la profession de foi musulmane. Tous ces succès irritaient profondément la masse des Koreïchites contre deux branches de la tribu, celle de Hachim et celle des Mottalib, qui, à cause de leur parenté avec Mahomet, lui offraient un puissant appui. Une ligue contre ces deux branches est formée dans le but de les exclure de toutes les relations civiles et {com-


  1. Voy. chap. XVII, 87.