Page:Le Normand - La Maison aux phlox, 1941.djvu/116

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[116]
LA MAISON

changé ? Elle me nommait des gens, et si, par hasard, sur un nom, je savais quelque chose, cela semblait pour elle comme un peu de nourriture pour un affamé.


La bonne vint chercher ma petite fille qui jouait à nos pieds. C’était l’heure du repas.

— Je retourne par le train, ce soir…

Elle me demanda le nom d’un taxi, pour se rendre à la gare.

Elle ne me chargea d’aucun message pour ses parents, et elle s’en alla. Ses souliers éculés faisaient légèrement crisser le sable de l’allée. Un trou dans son bas noir laissait voir son talon. Comment aurais-je pu l’engager sur cette apparence qui parlait contre elle ? Et d’ailleurs, puisque je n’avais pas besoin de bonne. Et son alliance ? Où était le mari ?

Le soir, je vis M. X. Il n’en savait pas grand’chose. Elle était venue au chef-lieu porter plainte contre son mari qui la maltraitait. Dans son hameau, elle était organiste. Elle avait vingt-cinq ans, et trois enfants. Je ne m’étais pas trompée. Son cauchemar n’était pas celui dont le réveil nous tire. Et dans le mystère de cette vie qui ne m’avait que frôlée j’essayai d’imaginer les circonstances premières.

Elle avait dû se marier à dix-sept ans, sans le consentement de ses parents — et avec le