Page:Le Normand - La Maison aux phlox, 1941.djvu/161

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
AUX PHLOX
[161]

sonné. Le laitier promenait la mauvaise nouvelle avec ses bouteilles. Pourtant, l’oasis gardait sa sérénité extérieure, son immobilité heureuse. Nous étions à pied maintenant, et attentives à la tranquillité des choses, pendant que notre pensée approfondissait la grandeur du cataclysme. Notre gorge se serrait. Nous ne pouvions plus parler.

Un petit hangar au bord de l’eau, blanchi, avec un toit rouge, brillait devant nous de fraîcheur et de joie au soleil ; et à côté son ombre se découpait, nette, plaquée, dans l’herbe au bord du barachois.

Et l’ombre et l’eau du barachois paraissaient absolument solides comme la terre sous nos pieds.

Et il me sembla que jamais nous ne pourrions oublier cette paix inouïe du paysage, au moment où déjà, là-bas, recommençaient les massacres, les courses dans le feu, le flot de sang…