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LA MAISON

immobiles que dépassent vos ombres mouvantes, glissant sur la terre ensoleillée du chemin.

La rue s’allonge, déserte, au pied des villas les yeux éteints pour l’hiver. La rue s’allonge, déserte et silencieuse, d’un grand silence parfait, reposant, prolongé jusqu’au calme sommet des montagnes, un silence immense et riche.

Croisant la rue déserte passent d’autres petites rues aussi vides, aussi muettes, qui montent vers l’église blanche, le couvent rouge ; ou descendent vers la plaque bleu dur du lac nu, qui se voit à présent de partout, à travers les balais défeuillés des trembles, la fine ramure des bouleaux, la touffe échevelée des branchettes du saule.

Au bout du lac brillent des façades blanches, que le soleil frappe et dont les vitres semblent de mica. Ces maisons se mirent dans l’eau où les feuillages auparavant les empêchaient de se voir. Elles se reflètent avec une exactitude parfaite, qu’aucune ride ne modifie, car l’eau a froid. La réalité et son reflet sont si semblables que vous croiriez un monde à l’envers.

Puis la rue déserte traverse la petite rue qui conduit à l’autre rive du lac, le lac est fini. Des fenêtres habitées vous regardent ; quelques magasins, deux restaurants ; vous continuez ; vos ombres dévient sur le sol blond, la rue déserte tourne, semble se fermer. Une maison blanche