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AUX PHLOX
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montait d’abord dans l’étonnant silence, l’étonnante et divine paix. Mais même l’effort leur paraissait exquis. Respirer un air si pur ! Voir un paysage si pur ! Puis elles redescendirent, glissèrent au seul bruit léger des skis rayant la neige neuve. Marie se sentit dans l’espace, soudain détachée du temps, et elle savoura son bonheur sans désir et sans regret, et la légèreté de son cœur. Même la vie semblait définitivement facile.

Elles allaient seules parmi les arbres. Les sentiers étaient tracés, ils avaient des noms : Dunlop road, Skyline trail, etc. À mesure qu’elles avançaient, les jeunes arbres cédaient la place à une riche forêt : de gros bouleaux à l’écorce blanche toute dessinée d’yeux noirs, des hêtres au tronc lisse couleur de fumée, des chênes qui voisinaient avec d’innombrables conifères. Le parasol des pins bruissait. De jeunes ormes avaient tout l’hiver conservé leurs feuilles jaunes ; recroquevillées en forme de cornet, elles chantaient dans le silence une musique éolienne.

Un tout petit écureuil effarouché, se précipitait d’un arbre pour courir se cacher dans un trou de neige. Il sortait la tête, avec précaution inspectait les alentours, puis disparaissait de nouveau, parce que les skieuses demeuraient un moment à le guetter.