Page:Le Normand - La Maison aux phlox, 1941.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[42]
LA MAISON

elle l’aimait tant ! de ne plus pouvoir lire, faute de loisirs et de tranquillité.

Le thé au rhum réchauffe Christine. Elle prend la parole. Au Canada, c’est ceci, c’est cela. Au Canada, en décembre, il y a de la neige, mais il y a aussi du soleil, beaucoup de soleil ; les couchers de soleil de décembre et de janvier sont des merveilles. Christine est poète. Christine décrit le fleuve glacé, les montagnes blanches piquées de sapins sombres, les grandes bandes orangées du ciel…

Pendant qu’elle raconte, le gredin de Pierre au moins ne peut pas dire un mot. Il va regretter d’avoir mis tant de rhum dans le thé. Christine décrit sa traversée, sa joie, à Calais, de se dire : « Je suis en France. » Et puis, ses premières courses dans Paris, un grand plan dans sa poche, qu’elle dépliait en entier au coin des rues, si soudain elle se croyait perdue.

A-t-elle été enchantée de Paris, en arrivant ?

Pas autant qu’elle l’espérait d’abord, mais maintenant, elle l’est. Au début, tout ressemblait trop aux cartes postales qu’Isabelle lui avait si souvent adressées, trop à ce qu’elle en avait vu au cinéma. Elle se reconnaissait partout sans guide. Mais Christine avoua qu’elle était un peu ennuyée de se faire rabrouer chaque fois qu’elle demandait un renseignement. Les fonctionnaires n’étaient ni polis, ni galants.