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AUX PHLOX
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Pourtant, au Canada, on disait encore d’un homme poli qu’il avait hérité de la galanterie française de ses ancêtres ! Christine était également ahurie, parce qu’on tenait absolument à ce qu’elle aimât mieux parler l’anglais que le français ; on tenait même à ce qu’elle fût un peu anglaise.

Mais c’était en français qu’au Canada elle avait fait ses études ! Sa mère ne parlait même pas d’autre langue ! Christine avait de l’accent, elle employait des expressions désuètes, elle l’admettait ; mais elle n’était pas sûre que ses compagnes de pension eussent raison de dire, lorsqu’elle demandait :

— Quel quantième est-ce aujourd’hui ?

— Vous parlez comme nos grand’mères ! Elles, disaient pourtant :

— Le combien, aujourd’hui ?

À choisir entre quantième et combien, quantième était sûrement plus juste.

Le thé au rhum avait fait envoler toute timidité chez Christine. Elle interrogeait Isabelle. Pierre pouvait à peine contredire et recommencer à critiquer…

Tout de même, l’heure arriva de rentrer à la pension, de dire adieu. Le mari se tenait là comme une sentinelle, obstinément. Il faisait les honneurs du salon froid, qu’il tenait à faire