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AUX PHLOX
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La vie était-elle souvent ainsi ?

Le lendemain, un petit bleu de son amie lui disait de revenir bientôt, de revenir souvent, n’importe quel autre jour que le samedi et le dimanche ; elles seraient alors seules et pourraient causer plus gentiment. Isabelle avouait :

— Car vous avez dû vous rendre compte que je ne suis pas heureuse.

Christine s’arrange donc désormais pour ne plus jamais revoir Pierre. Mais elle revoit souvent Isabelle, la retrouve telle que dans ses lettres, charmante, douce, intelligente, et bien émouvante dans son malheur…

Pierre fait des scènes, boude des mois entiers. Il s’enferme à clé dans le salon, s’y fait servir ses repas par la bonne, qui doit jurer qu’elle les a cuits elle-même. Mais Isabelle a pitié de lui, trouve que pour nourrir ses humeurs noires il lui faut au moins de bons mets. Elle ne le laisse pas empoisonner par l’art douteux de la servante, quoiqu’elle doive souvent en avoir envie. Elle se dévoue dans l’ombre.

Avec Christine, elle retrouve le courage de rire, même des faits et gestes de Pierre, si cocasses d’enfantillage.

Elles rient ensemble, en buvant du thé — mais du thé sans rhum.