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LA MONTAGNE D’HIVER

file ininterrompue et serrée de skieurs qui s’éparpillaient au sommet pour la descente, comme une volée d’oiseaux multicolores. Le bonheur du ski s’étalait dans sa gloire. Tout était magnifique, lumineux, allégresse de transfiguration.

Ceux qui tombaient ne se relevaient pas immédiatement. Ils faisaient pivoter leurs skis et s’allongeaient face au firmament bleu, savourant la qualité unique de l’heure, l’ineffable climat, la clarté, l’odeur de la neige sur laquelle, entre les cils, les regards éblouis discernaient partout des points d’or.

Pour mieux profiter de la chaleur du soleil, quelques-uns, fatigués ou alanguis, cessaient de remonter. Grâce à une savante technique, ils faisaient de leurs skis posés à l’envers sur leurs bâtons solidement ancrés dans la neige, des planches obliques sur lesquelles ils s’appuyaient, face tendue vers les rayons. Les visages huilés brunissaient pendant que sur la blancheur du sol s’éparpillaient peu à peu les taches rouges, bleues, jaunes, des chandails superflus jetés au hasard.

Un peu plus tard, autour du Casse-Croûte, tout le monde se reposerait, dévorant des sandwiches, buvant du café et admirant le village qu’ils dominaient de la terrasse où s’alignaient les tables.


Aujourd’hui, le programme de Madeleine comportait un changement. Elle conduisait un groupe de touristes vers La Solitaire. Ils escaladeraient la montagne, en exploreraient le sommet et mangeraient en plein air. Un petit garçon battait la marche, charmant, un peu tyrannique. Quand sa mère le rappelait à l’ordre, — et l’excusait disant