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LA MONTAGNE D’HIVER

sur une table à café, dans une poterie vert jade, un cyclamen étalait les bonnets roses de ses fleurs. Madeleine n’en avait jamais vu de plus beau. Elle retourna à la grande fenêtre. Elle voulait tout embrasser à la fois. Ce décor l’enchantait.

— Vous êtes en hiver. Et si vous aviez vu le Montréal humide et sale que j’ai quitté ce matin ! J’avais peur de retrouver ici ce même automne triste et sans couleur.

— Ah ! l’automne n’est jamais laid, ici.

La villa pouvait paraître isolée sur ses hauteurs, mais les voisins étaient proches, et il n’y avait pas beaucoup plus qu’un arpent à descendre pour atteindre la rue principale.

— Je tenais à être à proximité de l’église, pour finir mes jours.

— Finir vos jours ?

— Mais oui. J’ai bien l’intention de ne plus déménager, de mourir ici…

Une servante, toute menue, souriante, en uniforme vert pâle, entrait avec un plateau :

— Tiens, Marie a pensé qu’un bon café te réchaufferait et t’aiderait à attendre le repas, qui sera bon, je te le promets. Marie est excellent cordon bleu. Et c’est mon miracle vivant…

— Vous êtes aussi le mien, mademoiselle…

— C’est entendu. Ah ! je descends au village, Marie, au bureau de poste et à l’épicerie. Avez-vous besoin de quelque chose ?

— J’ai une petite liste…


Heureuse de se dégourdir un peu, quelques minutes plus tard, Madeleine accompagnait Louise. Elles marchèrent au centre de la route déserte. L’asphalte fumait sous les rayons du soleil.