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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/19

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L’INDE ANTIQUE.

mense périmètre de l’Inde contenait tous les éléments d’anthropographie d’où les classificateurs modernes ont tiré le genre homme et ses trois grandes divisions ou races.

Dans les forêts vierges, dans les djungles insondables qui couvraient alors tout l’intérieur du Deccan et le bassin entier du Brahmapoutre, ainsi que sur la plus grande partie de l’immense littoral qui s’étend du delta du Gange à celui du Sind, vivaient des peuplades à la peau noire, aux cheveux crépus, à la face prognate, aux lèvres bestiales. Issus des premiers éclaireurs de l’armée humaine^ marchant à la conquête du monde, ces nègres avaient subi, à un degré dont rien d’actuel ne peut donner l’idée, les conséquences de cette loi fatale qui veut que l’homme paye par la dégradation de son cœur, de sa raison et de son organisme entier, toute atteinte à la terrible virginité de la terre. Plus peut-être que ceux de leurs descendants qui végètent encore en Afrique et dans la Malaisie, sur les degrés infimes de l’échelle sociale, ils portaient, empreint dans leurs traits, dans leurs mœurs et dans leurs institutions, le cachet indélébile de la malédiction de la nature primordiale. Loin de saluer en elle, comme le firent plus tard les Occidentaux, la mère et la nourrice des hommes et des choses, ils ne la considéraient que comme une implacable marâtre, comme le mauvais principe de la création ; à ce titre ils lui vouaient un culte, mais celui de la crainte ; et, lui donnant pour symboles les monstres les plus redoutés des eaux et des bois, les pythons aux enlacements implacables, les vipères au venin foudroyant, ils ne lui offraient en sacrifice que le sang et la chair de l’homme. Les cultes de Bhawani, de Dourga, de Kali qui, de nos jours, ont eu le Thuggisme pour conséquence dernière, dérivent de ces vieilles croyances kouchites, dont les paroles suivantes, recueillies dans le plus ancien des commentaires des Védas, nous apparaissent comme le résumé métaphysique, la pensée justificative et la sombre genèse : Au commencement, il n’existait rien en ce monde, rien, si peu que ce fût ; tout était enveloppe par la mort, par la faim, car la mort c’est la faim !  !  !…

Une seconde couche de population, pressant et poussant la première du nord-ouest au sud-est, s’étendait sur les plateaux du Mâlva, sur les revers des monts Vindhias et le long des Ghauts occidentaux : race au teint de bronze, aux longs cheveux flottants, aux grands yeux doux et brillants, qui a ciselé son type irrécusable sur les rochers de Salcette