n’a su et divulgué cette dangereuse liaison ? Non, tout cela est chimérique, malgré deux textes de saint Jérôme et de saint Augustin, qui parlent d’une correspondance parfaitement apocryphe, que nous possédons. Ce qu’il faut admettre, c’est que le moyen âge, qui croyait à l’efficacité de l’apostolat, ne pouvait supposer que saint Paul avait été le contemporain de Sénèque, sans croire en même temps que l’apôtre convertit le philosophe. Illusion bien douce à la foi du moyen âge, mais néanmoins pure illusion ! « Nier, dit très-bien M. Aubertin, c’était, aux yeux du moyen âge, rabaisser le mérite de l’apôtre, amoindrir la puissance de l’Évangile, et commettre un sacrilège. Douter, c’était examiner les temps, comparer les situations, se rendre compte des vraisemblances, et, à ce prix, le doute et l’incrédulité lui répugnaient également. Avide d’apprendre et de croire, que lui importait de se tromper ? » Avec de telles dispositions, on fait des légendes, on propage de séduisantes erreurs, on ne fonde pas la vérité.
Ce qu’on pourrait reprocher à la thèse de M. Suckau sur Marc-Aurèle[1], c’est de manquer de nouveauté. Le sujet paraît épuisé et l’auteur, en rassemblant tout ce qu’on sait de la vie et de la doctrine de l’empereur romain, n’a pu chercher qu’a être complet. Peut-être n’est-ce pas assez, malgré toutes les qualités de son livre.
M. Lévèque qui, dans sa chaire de philosophie du Collége de France, s’occupe surtout d’esthétique, a publié, sur nôtre sculpteur Simart, une notice écrite avec prédilection[2], car il avait la bonne fortune de retrouver dans Simart l’image de ses propres théories en matière d’art. Le beau ! le beau ! c’était la recherche constante de ce sculpteur enivré de la beauté grecque, et pour qui semblait avoir été écrite cette pensée de Michel-Ange : « Il est téméraire, il est absurde, celui qui prétend obtenir de ses sens ce type de beauté qui émeut et emporte jusqu’au ciel toute saine intelligence. » Simart, à quinze ans, dans l’atelier de son père, simple menuisier à Troyes, sculptait en pierre une copie du buste de la Niobé antique. C’est tout dire : il n’y a qu’une vocation qui pousse à de tels essais. Après les ébauches, voici les œuvres, et j’y remarque cet Oreste, tel que l’a dépeint Eschyle, séduisant malgré son crime, beau comme s’il ne l’avait pas commis, et presque intéressant, parce qu’il l’a osé. Tout cela se retrouve dans l’Oreste de Simart : c’est l’Oreste des Euménides ; il est auprès de l’autel de Minerve ; le remords l’accable. Tête sévère, tête antique, mais où le feu de l’artiste a laissé sa trace ! Le Musée de Rouen possède aujourd’hui cette belle figure.
À ce sujet, M. Lévêque conseillé à nos sculpteurs de ne viser qu’à l’imitation de l’antique et de ne pas reproduire notre costume et nos airs modernes. Suivre la voie des Grecs, sans espoir d’aller aussi loin qu’eux, lui paraît la règle la meil-