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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/363

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THÉÂTRES.

d’ampleur. Sa voix juste et sympathique — surtout lorsqu’il chante — est toujours couverte d’applaudissements, et ne contribue pas peu à enlever le succès ; mais, voyez comme je suis difficile à satisfaire ; je vais empoisonner tant d’éloges par un léger conseil. Lorsque le comte dispute Rosine à son vieux tuteur par-devant l’alcade, il doit le faire d’une parole calme, accoutumée à être obéie. Il ne sied qu’aux petites gens de se fâcher dans les situations solennelles.

J’ignore si c’est la faute du milieu dans lequel je vis, mais je n’entends plus parler du Sicilien. Beaumarchais, comme vous allez le voir, me fournit l’occasion d’en dire quelques mots et je me gar derai de la perdre. — Vous vous rappelez à coup sûr avec quelle fantaisie charmante s’ouvre cette comédie de Molière ; « Il fait noir comme dans un four. Le ciel s’est habillé ce soir en Scaramouche, et je ne vois pas une étoile qui montre le bout de son nez. » Vous n’ignorez pas non plus avec quelle habileté le seigneur français Adraste sait appliquer la peinture à l’amour et trouver le moyen de dire le plus spirituellement du monde sa passion à une jeune fille, sous les yeux de son tuteur, tout en ayant l’air de s’occuper des lois strictes de la perspective et du dessin ; mais il est une chose dont tout le monde ne s’est pas aperçu, et Beaumarchais lui-même s’est bien gardé de nous l’apprendre. Cette chose la voici : le Barbier de Séville est excessivement imité du Sicilien.

Dans la pièce de Molière, Bartholo s’appelle don Pèdre ; Figaro, Hali ; Rosine, Isidore ; et Almaviva, Adraste. Dans chaque comédie, un vieillard amoureux prétend épouser sa pupille : un jeune amant plus adroit le prévient, et en fait sa femme à la barbe et dans la maison même du tuteur. Il serait maintenant curieux d’examiner les procédés de ces deux maîtres, et je me propose de le faire lorsqu’on reprendra le Sicilien. Dieu veuille que M. Empis m’en fournisse prochainement l’à-propos.


Du Barbier de Séville au Pamphlet il n’y a guère qu’un pas, mais il est immense et triste pour M. Ernest Legouvé.

Caron de Beaumarchais, ainsi que tous les grands pamphlétaires, attaquait corps à corps des ennemis réels : un siècle, ses puissances, des abus enracinés, généraux, redoutables. Pour se débattre ainsi dans un bénitier, l’auteur des Contes de la reine de Navarre a-t-il le même