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niser qu’autant qu’elles se « développent » régulièrement dans les Séries Progressives ou Séries de Groupes. Hors de ce mécanisme, les passions ne sont que des tigres déchaînés, des énigmes incompréhensibles ; c’est ce qui fait dire aux philosophes qu’il faudrait les réprimer : opinion doublement absurde en ce qu’on ne peut pas réprimer les passions (autrement que par la violence ou l’absorption réciproque), et en ce que, si chacun les réprimait, l’état civilisé déclinerait rapidement et retomberait à l’état nomade, dans lequel les passions seraient encore aussi malfaisantes qu’on les voit parmi nous, car je ne crois pas plus aux vertus des bergers qu’à celles de leurs apologistes… »

Fourier parle ici des « séries progressives » et des séries « de groupes ». Ces termes sont empruntés à l’autre grande théorie de Charles Fourier : la théorie de l’Association. Pour éviter le gaspillage, pour éviter le désordre, pour éviter l’incohérence de la société actuelle, il faut associer nos efforts, mais pour que ces efforts soient agréables — et Fourier cherchait justement de rendre notre vie la plus agréable possible — il faut varier notre travail. Il faut que nous, travaillions en groupes, en séries ; il ne faut pas que toute la journée, nous fassions le même travail insipide, monotone. Il faut que nous passions d’une occupation à une autre, pour nous reposer, en variant nos occupations et nos travaux, en nous associant avec des groupes accomplissant des travaux différents. C’est ce qu’il appelle « les séries » et « les groupes ».

Fourier suppose toujours que la Société se composera de cellules qu’il appelle tantôt « phalanstères », tantôt « familistères », tantôt « phalanges ». Et il demande que chaque association ne comprenne pas un trop grand nombre de personnes pour rendre l’harmonie et la solidarité possibles.

« L’Association agricole, dit-il, en la supposant élevée au nombre de mille personnes, présente à l’industrie des bénéfices si énormes qu’on a peine à s’expliquer l’insouciance des modernes à ce sujet ; il existe pourtant une classe de savants, les économistes, voués spécialement au calcul de perfectionnement industriel. Leur négligence à rechercher un procédé d’Association est d’autant plus inconcevable qu’ils ont eux-mêmes indiqué plusieurs des avantages qui en résulteraient. »

Voilà le grand principe, le principe de la coopération, qui suppose en même temps la division du travail et la suppres-