Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/28

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LE SYLPHE LA FERME A MIDI Il est midi : la ferme a l'air d'être endormie, Le hangar aux bouviers prête son ombre amie : Là, profitant de l'heure accordée au repos, Bergers et laboureurs sont couchés sur le dos, Et, près de retourner à leurs rudes ouvrages, Dans un calme sommeil réparent leurs courages ; Auprès d'eux sont épars les fourches, les râteaux, La charrette allongée et les lourds tombereaux. Par une porte ouverte on voit l'étable pleine Des bœufs et des chevaux revenus de la plaine. Ils prennent leurs repas; on les entend de loin Tirer du râtelier la luzerne et le foin; Leur queue aux crins flottants, sur leurs flancs qu'ils caressent, Fouette à coups redoublés les mouches qui les blessent. A quelques pas plus loin, un poulain familier Frotte son poil bourru le long d'un vieux pailler, Et des chèvres, debout contre une claire-voie, Montrent leurs fronts cornus et leurs barbes de soie. Les poules, hérissant leur dos bariolé, Grattent le sol, cherchant quelques graines de blé. Tout est en paix, le chien même dort sous un arbre, Sur la terre allongé comme un griffon de marbre. Au seuil de la maison, assise sur un banc, Entre ses doigts légers tournant son fuseau blanc, Le pied sur l'escabeau, la ménagère file, Surveillant du regard cette scène tranquille : Seul, perché sur un toit, un poulet étourdi Croit encore au matin et chante en plein midi. Charles REYNAUD, de Vienne (1821-1853).