Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 1, 1864.pdf/164

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mant de main en main, de maniére que le plus éloigné témoin en est mieux instruit que le plus voisin ; et le dernier informé mieux persuadé que le premier. C’est, dit-il, un progrès naturel[1]. Il n’est rien, continue-t-il, à quoi communément les hommes soient plus tendus qu’à donner cours à leurs opinions. Où le moïen ordinaire nous faut, nous y ajoutons le commandement, la force, le fer et le feu. Il y a du malheur d’en être-là, que la meilleure touche de la vérité, ce soit la multitude des Croïans, en une presse, où les fous surpassent de tant les sages en nombre. Pour moi, ajoute-t-il, de ce que je n’en croirai pas un, je n’en croirai pas cent même. Et ne juge pas, dit-il[2] les opinions par les ans. L’imposture se tapit plus aisément sous le voile de la pieté. Il s’engendre beaucoup plus d’abus au monde ou pour dire plus hardiment tous les abus du monde s’engendrent de ce qu’on nous aprend à craindre, à faire profession de notre ignorance, et sommes tenus d’accepter tout ce que nous ne pouvons réfuter.

Tous ces exemples et ces raisons que je viens de joindre, nous font clairement voir que les prétendus miracles se peuvent également faire, comme j’ai dit, par des méchans et par des bons aussi bien en faveur de l’erreur et du mensonge, qu’en faveur de la justice et de la vérité et par conséquent qu’il ne faut pas les regarder comme des preuves ou comme des témoignages certains et assurés de vérité.

C’est ce que je vais prouver encore evidemment par

  1. Ess. de Mont., p. 1037.
  2. Ess. de Mont., 1038, 1039.