Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 1, 1864.pdf/81

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment dans l’étonnement, où j’étois de voir tant d’erreurs, tant d’abus, tant de superstitions, tant d’impostures et tant de tirannie en règne ; étoit de voir que, quoiqu’il y eût grand nombre de personnages, qui passoient pour éminens en sagesse, en doctrine et en pieté, cependant il n’y en avoit aucun qui s’avisât de parler, ni de se déclarer ouvertement contre tant de si détestables désordres. Je ne voïois personne de distinction, qui les reprit et qui les blâmât ; quoique les pauvres peuples ne cessassent point de se plaindre, et de gémir entr’eux dans leurs misères communes. Le silence de tant de personnes sages et même d’un rang et d’un caractère distingués, qui devoient, ce me sembloit-il, s’oposer au torrent des vices et des superstitions, ou qui devoient au moins tâcher d’aporter quelques remèdes à tant de maux, me paroissoit avec étonnement une espèce d’aprobation, dont je ne voïois pas encore bien la raison, ni la cause. Mais aïant depuis examiné un peu mieux la conduite des hommes, et aïant depuis pénétré un peu plus avant dans les mistères secrèts de la fine et rusée politique de ceux, qui ambitionnent les charges, et qui affectent de vouloir gouverner les autres, et d’avoir de l’autorité sur eux, ou qui veulent plus particulièrement s’en faire honorer et respecter ; j’ai facilement reconnu non seulement la source et l’origine de tant d’erreurs, de tant de superstitions et de tant de si mauvais gouvernemens ; mais j’ai reconnu encore la raison pourquoi ceux, qui passent pour sages et éclairés dans le monde, ne disent rien contre tant de si détestables désordres, quoiqu’ils connoissent suffisamment les misères des peu-