Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 1, 1864.pdf/85

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qui, sous prétexte de vous conférer les biens spirituels d’une grace et d’une faveur toute divine, vous ravissent finement des biens qui sont incomparablement plus réels et plus solides que ceux qu’ils font semblant de vouloir vous conférer ; et qui, sous prétexte de vouloir vous conduire au ciel, et vous y procurer un bonheur éternel, vous empêchent de jouir tranquilement d’aucune véritable félicité sur la terre ; et qui enfin, sous prétexte de vouloir vous garantir dans une autre vie des peines imaginaires d’un enfer qui n’est point, non plus que cette autre vie éternelle dont ils entretiennent vainement pour vous, mais inutilement pour eux vos craintes et vos espérances, vous réduisent à souffrir dans cette vie, qui est la seule que vous aïez à prétendre, les peines réelles d’un véritable enfer.

Et comme la force de ces sortes de gouvernemens tiranniques ne subsistent que par les mêmes moïens et les mêmes principes qui les ont établis, et qu’il est dangereux de vouloir combattre les maximes fondamentales d’une religion, aussi bien que d’ébranler les loix fondamentales d’un état ou d’une république ; il ne faut pas s’étonner, si les personnes sages et éclairées se conforment aux loix générales de l’état, si injustes qu’elles puissent être, ou s’ils se conforment, au moins en aparence, à l’usage et à la politique d’une religion qu’ils trouvent établie, quoiqu’ils en reconnoissent suffisamment les erreurs et la vanité, parce que telle répugnance qu’ils puissent avoir à s’y soumettre, il leur est néanmoins beaucoup plus utile et avantageux de vivre tranquilement en conservant ce qu’ils peuvent