à quelques milles de leurs ateliers, un parc de chevaux, avaient choisi les meilleurs pour montures, forcé les gardiens à les suivre en qualité de guides, et tous ensemble s’étaient dirigés vers les frontières chinoises.
Tout parut d’abord favoriser les pauvres fugitifs. Ils traversèrent les monts Sayans sans obstacle, et s’ils eussent franchi de même les monts Tangnous, ils se fussent trouvés à l’abri de toute poursuite dans le pays des Kalkas, d’où vingt-cinq jours de marche les eussent amenés au milieu de tribus kirghises ayant avec celles du Caucase communauté de langue et de religion, et dès lors leur rentrée dans leur patrie n’eût plus été qu’une affaire de temps. Mais par malheur leur ignorance de la géographie locale les ramena dans l’Altaï, où ils se heurtèrent à des postes de Cosaques. On devine le reste ; une fois découverts, traqués sans relâche dans un dédale de ravins sans issue, ils finirent par tomber dans une embuscade où ils ne firent ni ne demandèrent quartier. Tous périrent, moins quatre dont on a toujours ignoré le destin.
Tel fut le récit que me fit à Semipalatinsk le prince G…, en partageant avec moi une tasse de thé, au grand étonnement de son état-major, qui déjà avait commandé un piquet de Cosaques pour me conduire en prison !