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Avec ces grandes idées, qui les apparentent aux beaux esprits de l’antiquité, les Mesayas sont d’une faiblesse étonnante en arithmétique et ne comptent que jusqu’à trois[1].

Leurs connaissances en toxicologie, longtemps redoutées des nations voisines, leur avaient valu la réputation d’insignes sorciers.

Certains poisons de ces Indiens transformaient en vingt-quatre heures un corps valide et sain en une chose amorphe et putréfiée ; d’autres poisons agissaient sur le sujet avec plus de lenteur. Son corps se courbait par degrés ; ses dents et ses ongles tombaient d’eux-mêmes, et la mort arrivait au bout de trois mois d’agonie.


Feyturia sur le lac Cudajaz.

Par bon nombre de leurs coutumes, ces descendants des Umaüas se rattachent aux vaillantes castes du Nord, à la veille de disparaître. Les exhortations des vieillards aux jeunes gens ; les grandes chasses au tapir, qui durent un mois entier et auxquelles la tribu prélude par des jeûnes ; l’usage religieux de fumer dans un calumet un tabac qu’ils nomment niopo, et d’en pousser la fumée aux quatre vents du ciel pour honorer le Grand-Esprit et le rendre favorable à leurs entreprises, toutes ces coutumes semblent avoir été empruntées par les Mesayas aux Iroquois et aux Hurons. Leurs invasions armées sur le territoire des Mirañhas sont décidées par les payès ou sorciers de la tribu sur la foi de certains présages. Ces charlatans, qui sont également médecins, jongleurs et charmeurs de serpents, firent des inductions d’heur ou de malheur de la position des étoiles et de la forme des nuages au coucher du soleil. Si le dieu Buêqué, l’oiseau vert et rose, chante dans les bois au moment du départ des guerriers, l’expédition projetée contre les Mirañhas est remise à l’année suivante. Si la troupe est en marche dans la forêt et que certain scarabée puant tombe d’un arbre sur un des guerriers, il se sépare à l’instant de ses compagnons, retourne chez lui et reste trois jours enfermé dans sa hutte.

Le salut matinal que s’adressent deux Mesayas consiste dans une confidence réciproque au sujet de leur dernier rêve. « Cette nuit j’ai rêvé de singe, dit l’un ; — Moi de chauve-souris, répond l’autre. » Cette politesse échangée, nos individus se séparent et chacun va de son côté.

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Les mœurs de ces Indiens sont pures, ainsi qu’il convient à des créatures primitives. Toutefois, cette pureté chez eux ne va pas jusqu’à se restreindre à la monogamie et le particulier qui jouit d’une certaine aisance, ou le guerrier que ses actions ont rendu célèbre, peut sans inconvénient devenir polygame.

Huit jours avant sa délivrance, la femme se retire

  1. Au delà par duplication.