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Page:Le Tour du monde - 18.djvu/129

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Passage de la Bruarà. — Dessin de Jules Noël d’après l’album de l’auteur.


VOYAGE DANS L’INTÉRIEUR DE L’ISLANDE,


PAR M. NOËL NOUGARET[1].


1866. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


Départ de Thingvellir. — Arrivée dans la plaine du Laugarvatn ; apparition des premières sources d’eau chaude. — Passage de la Bruarà. Arrivée dans la plaine des Geisers. — Le guide m’abandonne. — Éruption du grand Geiser. — Départ pour Thorfastathir.

Après avoir passé trois jours à explorer cette mémorable plaine de l’Althing où a palpité le cœur de la vieille république d’Islande, et où a été adopté solennellement, en l’an 1000, le culte du christianisme qui, en renversant de fond en comble l’Olympe scandinave du Walhalla, allait transformer cette population jusqu’alors si fière en un peuple d’enfants et de bons enfants, je partis dès le matin pour la plaine des Geisers. Je devais y arriver dans la soirée.

Nous louvoyâmes pendant une heure au milieu de cette plaine que sillonnent de profondes crevasses. Pour en sortir, il faut traverser le Hrafnagjà (ravin des Corbeaux), éboulement à ce point épouvantable qu’on dirait que tout un continent vient de s’effondrer. On arrive ensuite au pied de la trinité sévère du Kalfstindar, trois sombres volcans hérissés de scories fauves sur lesquelles on ne rencontre aucune trace de végétation. Pendant trois heures on chevauche au risque de se casser le cou au milieu de terrains volcaniques absolument dénudés. Enfin on parvient sur les hauteurs de Reydarbarmur, où un grand dédommagement attend le voyageur. Si jusque-là on a parcouru des défilés étroits, sans horizon, tout à coup la lumière se fait, les yeux peuvent se reposer sur une immense prairie qui comprend plus de cinq lieues carrées de superficie. La Bruarà et la Hvità la limitent à l’ouest et au sud-est, tandis qu’au nord elle est fermée par une puissante muraille qui la met à l’abri des grands vents. Dispersés çà et là, miroitent quelques petits lacs dont les principaux sont l’Apavatn et le Laugarvatn, où furent baptisés les premiers chrétiens d’Islande. Puis on voit s’élever au milieu de la plaine de hautes colonnes de vapeurs blanches qui indiquent la présence des premières sources chaudes et dont les eaux bouil-

  1. Suite. — Voyez page 113.