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fortunez. Entreprise I.


terre, & vins loger envne hoſtellerie amenāt ma fille auec moi, l’ayāt miſe au logis, i’eu enuie d’aller prendre langue & ſcauoir des nouuelles, pour auiſer à me gouuerner auec les marchāds du pais, touchant quelques marchandiſes que i’auois, & dont ie cuidois faire argent pour ſuruenir à mon voyage : Helas ! à la malheure pris-ie terre, ayant fait quelques tours, & parlé à quelques vns, ie retourné à l’hoſtellerie où ie trouué vn grand peuple amaſſé, dont il y en eut qui vindrent à moy auec l’hoſte, me dire, que ma fille eſtoit ſortie du logis, & qu’il eſtoit paſſé vn gentilhomme bien monté qui l’auoit enleuee, ſans qu’on eut peu y mettre ordre, tant cela fut fait diligemmēt. Ie me mis à lamenter ainſi qu’vn de ſes peres, ne ſcachant que faire : car chacun me diſoit que la faute n’en eſtoit point à l’hoſte, contre qui ie ne pouuois auoir action pour ceſte perte : parquoy tout promptement i’allay, & veins m’enqueſtant pour auoir des nouuelles, mais ie n’ay rien ſceu apprendre que ma perte. Il y en eut qui me dirent des enſeignes apparentes, ſuiuantes leſquelles ie donné iuſques à vn haure, où l’on me dit, qu’il y auoit eu vn perſonnage de la ſorte que ie le demandois, ie trouué vn vaiſſeau qui eſtoit preſt de ſuyure la meſme route, ie m’y embarqué, & le vent fut ſi bon, que le premier vaiſſeau moüilloit l’ancre ainſi que nous arriuions, ie vis le gētilhomme & la Belle qu’il emmenoit, mais ce n’eſtoit pas la mienne, bien qu’elle luy retiraſt & d’habits & de geſtes, ie m’enquis de quel ques vns qui elle pouuoit eſtre, & on me dit que c’eſtoit la fille du Duc de Pragence, qui luy