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Le uoyage des Princes


ray tantoſt celuy qu’elle me baillera ou enuoyera, car i’ay baillé deſia le mien à ſon fils dés ce matin, & demain i’expoſeray l’autre. La iardiniere s’ē alla en ſa maiſon & trouua le fils de l’autre qui luy apportoit le bouquet, qui à dire vray eſtoit bien faict : Elle le prit, & ſi toſt que le compagnon s’en fut allé. elle vint trouuer le marchand, le priant qu’elle eut le ſien du matin. Le lendemain la iardiniere vint querir le bouquet & le trouua faict d’vne bien plus habile ſorte que celuy de ſon ennemie & le ſien : Elle le poſa pour eſtre iugé. Les bouquets eſtans deuant Lofnis, elle les viſita, & ſentit en ſon cœur vn certain mouuement, pour vne marque qu’elle vid en vn des bouquets : parquoy elle les prit & dict, ie les viſiteray, puis i’en diray mon aduis tantoſt. Elle entra en ſon cabinet, & viſitant le bouquet dont elle ſe doutoit, en oſta quelques fleurs ſuperflues, & ſurſemees, puis elle vid ſon pourtraict naifuement, faict és agencemens des fleurs, celà eſtoit faict ſelon vn artifice qui n’eſtoit commun qu’à elle & à Fonſteland, qu’il luy en auoit donné l’enuie, & l’auoit depuis ſi bien practiqué, qu’elle y eſtoit auſſi experte que luy : cela fit qu’elle ſe douta de quelque bien, & que ſon Fortuné n’eſtoit gueres loin, apres auoir remis les fleurs elle enuoya les bouquets à l’Empereur, qui auec le iugement de Lofnis ordonna que celle de qui eſtoit le bouquet marqueté fuſt iardiniere : Et il ſe trouua que c’eſtoit celuy de l’ordinaire, qui fut cōtinuee, dequoi ioyeuſe elle vint à Lofnis, afin auſſi de luy demāder confirmatiō, & s’il luy eſtoit agreable, car ain-