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Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/233

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Le uoyage des Princes


d’eſtat : Ie vous diray, ſi les Fortunez ont quelque choſe à me demander par les armes, i’ay aſſez de valeur & de force pour leur reſiſter, & rabatre leur impudēce : mais s’ils ſe veulent iuſtifier de ce dōt on les a accuſez, ie ſuis preſt de les ouyr en l’eſtat qu’ils choiſirōt. Lycambe. Sire, quād vo9 ſçaurez · tout, vous iugerez que lon leur a fait tort, & pour ce qu’ils ſont innocens, ils veulēt bié venir à vous ſur voſtre parole, afin que vous ſoyez leur iuge. Si vous ne le deſirez, ils paſſerōt outre, car vo9 ayans aymé, ils ne peuuēt que vous aymer touſiours, ils ne taſcheront point à vous offencer, ains à ruiner ceux qui les ont voulu perdre mal à propos, en vous ruinant auec eux : ſi vous les receuez, ils peuuēt vo9 faire plus de ſeruice que vous ne leur ſçauriez faire de mal. L’Emp. Vous m’auiez promis gariſon, & vous me bleſſez. Lycambe. Sire, ie vous en demande pardon, & me retire de peur de vous offencer d’auantage. L’Emp. Il n’en ſera pas ainſi, ie vous honore trop, mais parlez libremēt, & ne tenez point mon cœur en ſuſpens : On m’a ſouuent donné de telles feintes pour me reſiouyr, & ie les trouuois bonnes. A dire vray, ie croy, ſi ma fille eſt veritable, que les Fortunez ſont innocēs s’ils viuēt, s’ils ne ſont plus ils en ſont cauſe, ils deuoiēt preuoir à leur mal en preuoyāt au miē. S’ils ſont viuans, & qu’il ſoit vray qu il n’y a point de coulpe en eux, qu’ils viennent hardiment, qu’ils m’en eſclairciſſent, ie ſuis Prince de foy, ie mourrait auant que me retracter, & ie les receuray comme mes enfans, & bien-faicteurs, que s’il y a tort en eux qu’ils y aduiſent, i’ay aſſez de pouuoir pour reſiſter à tous leurs amis.