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Le uoyage des Princes


tous ceux qui ſont paruenus au terme de l’excellence. Les trois Princes furent eſleuez ſoigneuſement en ce palais (auſſi le premier petit baſtiment eſt dit le Palais du cœur,) & les ſages y prirent la douce peine, qui auec le temps eſclot le contentement, conduiſant ces beaux eſprits aux ſciences ſelon toutes les lieſſes de cœur que le ſoin doucement ordonné peut conceder. La malheureuſe contrainte, la rouge feſſerie, qui eſt le deſgouſtement des eſprits, ne s’y eſt point trouuee : mais toute iuſte liberté, fourniſſant de loiſir & d’occaſions, à ces beaux aſtres leuans de s’accomplir en lumieres parfaites. Ce qui a tant bien ſuccedé à ces perſonnages, chacun y ayant employé ce en quoy il excelloit, qu’ils mirent ces nouueaux cœurs en eſtat de ſe pouuoir eſgaler àux plus accords, ſi qu’outre l’addreſſe qu’ils auoient aux armes, & autres exercices communs aux Princes, ils paroiſſoient ſages, de belles mœurs, & doctes, non de la doctrine de ces arracheurs de paroles, qui fueillettent les liures pour y trouuer pluſtoſt vn mot pour s’emplir la bouche, qu’vne bonne ſentence qui ayt efficace à leur faire oublier l’auarice & le reſte des villennies pedagogiques. Et ce qui fut le plus recommendable, eſt qu’en peu de temps ont en vit tant de ſignes que la foy de l’effet ſurmontoit l’opinion, auſſi ce n’eſt rien d’eſtre vaillant, heureux & ſçauant, il conuient eſtre ſage. La ſageſſe eſt l’vnique fruict des labeurs, elle eſt le remede à tous mauuais accidens, l’ornement de la bonne Fortune, & le bien accomply de toutes ſinceres actions, comme but