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Le uoyage des Princes

diſpoſition à laquelle ie me ſuis determinee, partant ie vous remets à ce que vous en diſcourra ma ſage compagne Canocoïs, de laquelle vous le ſçaurez, & ie vous prie m’en excuſer, & i’ay tant de fiance en voſtre courtoyſie, que ie penſerois faire tort à voſtre bonté, de vous en requerir d’auātage, pource que ie vous preſume diſpoſez à laiſſer mon cœur au repos qu’il ſe veut eſtablir durant la miſere que ie cours. Ils eſtoiét fort affectionnez à ce deuis, que le Prince Nicoſtride grand Maiſtre vint luy-meſme querir les Fortunez que le Roy demandoit, tellemët qu’ils prirent congé iuſques au temps opportun, qui fut dés le ſoir, dautant qu’ils eſtoient preſſez de partir : Donques apres ſouper ayant diſcouru auec Cliambe, ils luy perſuaderent de voir ceſte belle Princeſſe, qu’ils luy dirent & au Roy, eſtre Etherine fille du Roy de Boron, & de laquelle ayant ſçeu les affaires, furent tres-contans qu’elle fuſt pres d’eux : Et cecy fut conduit ſi ſecrettement, qu’il n’y auoit que le Roy, la Royne, & la Princeſſe qui ſceuſſent l’affaire. Elle fut donques mandee & receuë honorablement. Dés ce ſoir le Rov la Royne & Cliambe eſtans au cabinet ſus le iardin, n’ayans auec eux que les Fortunez, auec Etherine & la ſage Canocoïs, ils ſceurent toute la fortune de la triſte Etherine, que Canocois continua ainſi, depuis qu’elle fut expoſee & m’eſt auis que ie ſuiuray de poinct en poinct ce qui en eſt, le vous deduiſant cōme elle le diſcouroit. Etherine aiant eſté quelque eſpace de temps en ce lieu de miſere, la peur n’arreſta gueres à l’aſſaillir de tous coſtez, & en ceſte detreſſe la crainte luy figuroit à trauers les arbres