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Le uoyage des Princes


Vous m’auez retiré des obiects periſſables,
Seule m’ayant fait voir les images d’honneur,
Par vous i’ay recognu les ſuiects deſirables,
Seuls dignes d’eſmouuoir les ſecrets de mon cœur.
Je renonce à iamais aux vanitez paſſantes,
Ie ne veux plus rien voir qui ne ſoit iuſte & ſaint,
Des erreurs de iadis deſſus moy dominantes
Pour ne plus ſ’allumer, le deſir eſt eſteint.
Qu’vne douce beauté par les vertus conduite,
A ſur les volontez d’equitable pouuoir !
Belle, conſiderez voſtre vnique merite,
Comme prince abſolu me renger au deuoir,
Que ie ſuis glorieux de ſi belle fortune,
Que mon cœur eſt contant d’admirer ces beaux yeux !
Mon ame vou ſuyuat d’vne ardeur non cōmune,
En ſouhaits accomplis, ſ’eſlene iuſqu’aux cieux.
Seule vous cognoiſſant digne d’eſtre eſtimee,
Ie mets icy le terme à mes ambitions,
Mon ame ne ſera cyapres animee
D’autres feux, d’autre Amour, d’autres deuotions.

Le chant acheué, la Belle dit à cet Amant Prodile ; Ie n’ay iamais douté de voſtre affection, auſſi nous ne nous ſommes point ſeparez l’vn de l’autre pour frauder l’Amour. Quand vous m’auez faict des proteſtations veritables ie les ay creuës, vous certifiant mon amitié : Si vous m’auez eſcrit, ie vous ay fait reſponce ; auſſi noſtre amour eſtoit ſimple, reciproque & fidele, auquel il n’y auoit rien meſlé d’eſtrange, la raiſon la conduit, & la vertu l’a continué tant que le deuoir nous l’a permis, Si le ciel l’eut ordonné, nous euſ-