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Le uoyage des Princes


le plaiſir que i’y pris ne péſant pas à la conſequēce qui ſ’en deuoit enſuyure, ie n’y mis point d’ordre, ains m’y laiſſé emporter, tellemēt que ie me vi toute à vn eſtrāger, que ie ne cognoiſlois point bien que la beauté de sō bel eſprit me fut en grāde recommendation : Ie n’auois pas toute égaré ma raiſon, partant ie me mis à penſer ce qui m’eſtoit auenu, & ie trouué que poſſible ie me meſprenois & parauanture auſſi que non, ſi que i’eſtois en ſuſpens de ce que ie deuois reſoudre ; à la fin ie voulu mettre mon ame en repos, pour ce faire ie parlé à ce Prince, & le coniuré tant, que preſſé par ferment de me declarer ſa condition, ſon éſtre, & ſes parens : il me confeſſa qu’il eſtoit fils de Roy, ce qui fut cauſe que deſlors i’acheué d’abandonner mon cœur, à ſouffrir la recherche qu’il faiſoit de moy, pour obtenir mon amitié, & ſelon ſon deſir qui eſtoit le mien ie le receu, & l’amour deueint mutuel à la charge & condition qu’il ſeroit tenu & ſerré au chaſte ſecret de nos ames. Cependant il eſt auenu que cét Anniuerſaire eſtant publié, i’ay ſceu qu’il falloit que tous les vrays & pudiques amans y vinſſent, meſmes Viuarambe me fit ſcauoir ce qui en eſtoit, & depuis ſon abſence (car il ne demeura pas longtēps en mon Royaume) me fit entendre par lettres les ſtatuts & ordonnances qui ſont obſeruees és auantures qui ſ’acheuent icy ordinairement, & m’auertit des belles fortunes qui ſouuent y peuuent auenir, qui fut occaſion que ie me preparé pour venir icy pelerine, faire mō voyage d’amour : ayāt mis ordre à mō equipage ie me teins preſt & retardé mō embarquemēt, croyāt que celui qui