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Le uoyage des Princes


n’eſt-ce point en vſer comme on faict à ceux qui languiſſent ſans eſpoir de reſchaper, de me propoſer des paroles qui autresfois euſſent eſté ma vie, & à ceſte heure me ſont vn traict deſ laiſant & mortel : ceſte belle conſolation & ces § paroles en temps propre, m’euſſent en tretenu & fait viure, mais hors temps m’appor tent du deſpit, & puis apres ma reſolution me ſont indifferentes : voilà ce ſont de beaux artifi ces qu’il me faut trouuer bons pource qu’ils vië ment de vous, qui viuez de la † que vous ob tenez ſur tous les cœurs. Or belle ieme rauiſe, ie quittetoute diſpute, ie me departs de toutes re proches, & veux auoir tort s’il vous plaiſt : Mais ſi depuis tant de fois que ie me ſuis aduancé à mon deuoir, vous l’euſſiez recogneu, au moins d’vne ombre de bonne volonté, vous m’euſſiez autant obligé que vos deſdains exercez ſur moy ſans raiſon & ſi longtemps m’ont cruellement eſtrangé : Toutesfois ayant laſché ceſte deſpi teuſe colere, ie penſe à vos belles paroles, & me repreſentant ce queie doy à la beauté que i’ay me tant, ie vous veux deſduire mes fantaiſies, mes volontez, & mes recognoiſſances, pour ce que vos doux accens ſont allez iuſques au plus delicat de mon ame, & l’ont ramenee du deſtroit où ſon affliction l’arreſtoit, pout ſe remettre à vous ſeruir, file deſtin le veut.

Un iour recognoiſſant que ie ſuis incapable
Belle de vous ſeruir i’en vins au deſeſpoir,
Et prenant le chemin du deſert effroyable,
Je voulu m’y cacher pour iamais ne rien voir.


C'eſt