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La Princesse Camion.

doucement dans le boſquet ; & comme il faiſoit fort obſcur, il ne voyoit rien : il écouta donc de toutes ſes oreilles, & voici mot pour mot ce qu’il entendit.

Mon père étoit roi d’un pays voiſin du Mont-Caucaſe, il régnoit le mieux qu’il pouvoit ſur un peuple d’une méchanceté incroyable ; c’étoit des révoltes perpétuelles : ſouvent les fenêtres de ſon palais avoient été fracaſſées par les pierres qu’on lui jetoit. La reine ma mère qui avoit beaucoup d’eſprit, lui compoſoit des harangues pour appaiſer les ſéditions ; mais quand une avoit réuſſi un jour, le lendemain c’étoit un nouveau train. Les juges étoient las de condamner à mort, & les bourreaux de pendre ; enfin cela vint à un point ſi violent, que voyant que toutes nos provinces mêmes ſe réuniſſoient contre nous, mon père réſolut de s’en aller à la campagne pour ne plus voir des choſes ſi déſagréables. Il mena la reine avec lui, & laiſſa le royaume à gouverner à un de ſes miniſtres qui étoit fort ſage, & moins poltron que le roi mon père. Ma mère étoit groſſe de moi, ainſi elle arriva avec peine au bas du Mont-Caucaſe, où mon père avoit choiſi ſon habitation. Nos méchans ſujets firent des feux de joie à leur départ, & le lendemain,