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La Princesse Camion

ils étranglèrent notre miniſtre, diſant qu’il vouloit faire l’entendu, & qu’ils aimoient encore mieux leur roi. Mon père ne fut point touché de leur préférence, & reſta caché dans ſa petite maiſon, où bientôt je vis le jour.

On me nomma Camion, parce que j’étois fort petite ; d’ailleurs, le roi & la reine bien las d’honneurs qui leur avoient coûté ſi cher, voulant me cacher ma naiſſance, m’élevèrent comme une bergère. Au bout de dix ans qui leur avoient paru dix minutes, tant ils étoient contens dans leur retraite, les fées qui habitent le Caucaſe, indignées de la méchanceté des gens qui peuploient notre royaume, réſolurent d’y mettre ordre.

Un jour que j’étois avec mes moutons dans la prairie qui joignoit notre jardin, deux vieilles bergères m’accoſtèrent, & me prièrent de leur donner retraite pour la nuit ; elles avoient l’air ſi abattues & ſi triſtes, que mon ame s’en émut de compaſſion. Venez, leur dis-je, mon père qui eſt paſteur voudra bien vous recevoir. Je courus à la cabane pour l’avertir de leur arrivée ; il vint au-devant d’elles, & les reçut avec beaucoup de bonté, ainſi que la reine ma mère. Je fis rentrer alors mes brebis, & je leur

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Tome XXXIII.