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La Princesse Camion.

tirai du lait pour nos hôteſſes. Pendant ce temps, mon père leur apprêta un bon petit ſouper, & la reine qui, comme je vous l’ai déjà dit, avoit bien de l’eſprit, les entretenoit à merveille.

J’avois un petit agneau que j’aimois à la folie ; mon père m’appela pour le lui donner, afin de le mettre à la broche ; je n’étois pas accoutumée à réſiſter à ſes volontés, ainſi je le lui portai ; mais j’en étois ſi affligée, que j’allai pleurer auprès de ma mère, qui de ſon côté étoit ſi occupée à parler à ces bonnes femmes, qu’elle n’y prit pas garde. Qu’a donc la petite Camion, dit une d’elles, qui me vit toute en larmes ? Hélas ! madame, lui dis-je, c’eſt mon père, qui vous fait rôtir mon petit agneau. Comment, dit celle qui n’avoit rien dit encore, c’eſt pour nous qu’on fait ce mal à la jolie Camion ! Alors ſe levant, & donnant un coup de baguette, il ſortit à l’inſtant de deſſous terre une table magnifiquement ſervie, & les deux vieilles bergères devinrent deux dames ſi belles & ſi éclatantes de pierreries, que j’en reſtai toute immobile, juſques-là même que je ne fis pas attention que mon petit agneau bondiſſait par la chambre, & faiſoit mille ſauts qui réjouirent beaucoup la compagnie ; je