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La Princesse Camion.

elle aura connu les malheurs de la vie, nous la protégerons en les adouciſſant : voilà ce qu’il nous eſt permis de vous dire ; parlez, après cela, nous pouvons tout pour vous.

Les fées ſe turent après cette harangue, la reine ſe tourna vers le roi pour lui dire de répondre, car elle pleuroit d’apprendre que j’étois deſtinée à être malheureuſe ; mais mon père n’étoit pas plus en état qu’elle de parler ; il faiſoit des cris pitoyables, & moi, les voyant pleurer, je quittai mon mouton pour venir pleurer avec eux. Les fées attendoient avec une grande impatience & un grand ſilence la fin de nos larmes ; enfin ma mère pouſſa un peu le roi, pour lui faire appercevoir qu’on attendoit ſa réponſe. Il ôta donc ſon mouchoir de deſſus ſon viſage, & dit, que puiſqu’il étoit décidé que je ſerois malheureuſe, aucun des biens qu’on lui offroit ne pouvoit lui être agréable, & qu’il refuſoit le bonheur qu’on lui promettoit, puiſqu’il feroit toujours empoiſonné par l’idée qu’il auroit de ce que j’avais à craindre. La reine ajouta, voyant que ce pauvre homme ne diſoit plus mot, qu’elle ſupplioit les fées de leur ôter la vie, le jour où le deſtin me feroit ſentir ſa rigueur ; &