Page:Le cabinet des fées - ou, Collection choisie des contes des fées, et autres contes merveilleux - 33 (1786).djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
260
La Princesse Camion.

che bien libre : de plus, j’étois déſolée de lui paroître une baleine, & je meſurois ſon averſion pour moi à celle que m’avoit inſpirée la vue du portrait du roi des Merlans, Citronette me raſſuroit, en me diſant que malgré la queue de baleine mon viſage étoit charmant ; je le croyois quelquefois, mais le plus ſouvent j’en étois inquiète, & après m’être regardée, je ne me trouvois pas aſſez bien pour croire que j’inſpirerois de l’amour à celui qui me l’avoit ſi bien fait connoitre ; moyenant cela, mon amour propre ſoutenoit ma vertu. Hélas ! en a-t-on de véritable que celle-là ? Il eſt bien rare d’en trouver une aſſez pure, pour n’être fondée ſur aucun de ces motifs.

Je paſſois mes jours à imaginer des moyens de le voir & de me faire voir à lui, & je détruiſois enſuite tout ce que j’avois imaginé. Citronette m’étoit d’un grand ſecours dans ce temps ; car il faut avouer qu’elle a infiniment d’eſprit, & plus encore de douceur & de complaiſance. Un jour que j’étois encore plus triſte qu’à l’ordinaire, car l’amour a cela de propre, qu’il porte aſſez les âmes douces à la triſteſſe ; je vis entrer l’affreuſe Marmotte avec deux perſonnes que je ne reconnus point d’abord. J’allai me mettre dans la tête que