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Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/58

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La jeunesse dorée de Macao boit à de petites tables ou, de temps en temps, sortant de la salle voisine, un fumeur, son opium cuvé, les rejoint. La plupart des jeunes gens sont comme da Fonseca d’origine portugaise, mais s’ils ont l’air de Portugais en Chine, ils auraient l’air de Chinois au Portugal.

Tous, même les Chinois, sont en veston et arborent d’énormes lunettes. Seul, assis à une table voisine de la nôtre, un vieux Chinois porte la robe, une exquise robe de soie pâle, avec des ramages ton sur ton. Il contemple de ses yeux plissés la jeunesse qui maintenant danse. Son visage a cette teinte crémeuse qu’offrent certaines potiches antiques et je m’amuse à compter les onze poils qui lui tiennent lieu de moustache et les sept autres fixés à son menton. Il boit à petites gorgées une tasse de thé vert et ses longs doigts brunis par la drogue s’ornent d’ongles démesurés.

L’orchestre philippin attaque un blues.

— Cela ne doit vous rappeler que de très loin New-York ? s’excuse le jeune Fonseca.

— Je ne pensais pas à New-York, répondis-je. Vous y êtes allé ?