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de la scie à ruban, privées de leur jet, passer aux tours, où elles sont biseautées en tête et en pied, échoppées à grands coups de maillet, et, brûlantes encore, portées aux machines qui les attendent, et qui les reçoivent cinq minutes au plus après leur sortie du creuset !

Si la composition d’un journal est une merveille, son tirage en est une bien plus grande encore. Il y a cinquante ans à peine le tirage des journaux se faisait au moyen de presses à bras, qui donnaient à l'heure deux ou trois cents feuilles imprimées d’un seul côté ; avec beaucoup d'efforts et d’habileté, et en relevant plusieurs fois les pressiers, on arrivait à doubler ce tirage. On se voyait quelquefois obligé de faire deux, trois et jusqu’à quatre compositions, pour paraître en temps utile. C'est à un directeur du Times, M. Walter, qu’appartient l'honneur d’avoir mis la vapeur au service de l'imprimerie. Dès 1804 cet homme remarquable à plus d’un titre, et auquel le Times doit sa prodigieuse fortune, s'était convaincu de la possibilité de substituer cet agent infatigable aux bras des pressiers, et de donner au tirage de son journal une régularité et surtout une rapidité que sa prospérité croissante rendait nécessaires. Il se livra, dans cette pensée, à de nombreux et dispendieux essais, qu’il était obligé de faire dans le plus grand mystère, à cause de l'opposition déclarée des pressiers ; et c’est seulement après dix ans d'efforts et de sacrifices qu’il arriva à la solution du problème qu'il s'était imposé. Enfin le 29 novembre 1814, à six heures du matin, Walter put montrer à ses ouvriers et à Londres étonnés le premier exemplaire d’un journal imprimé à la vapeur. Ces premières presses, qui devinrent aus-