Aller au contenu

Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

iiie ou le iie siècle av. J.-C., la langue des fragments araméens, date qui convient aussi à la langue des fragments enhébreu. Les conservateurs sont donc obligés de postuler un original sémitique plus ancien, demeuré inconnu jusqu’au moment où il fut publié, plus probablement en araméen, avant l’an 165. Quelle fut la portée de ce remaniement, nul ne peut le dire. Ce qui est évident, c’est la puissante unité spirituelle du livre, malgré une apparence de compilation. Point d’unité historique, si l’on entend par là un enchaînement des faits de l’histoire, ou simplement leur développement suivi. Point d’unité littéraire, puisque des épisodes détachés de la vie de Daniel (I-VI) sont suivis du récit de ses visions (VII-XII). Et cependant une même pensée, haute et forte, dispose tous ces éléments pour conduire à la conclusion inéluctable de la domination de Dieu sur les royaumes. Le Dieu qui donne aux rois « de grandes et terribles leçons », se contente de les humilier comme Nabuchodonosor, ou de les éprouver, comme Darius, mais il frappe sans pitié un sacrilège comme Baltasar. Ce Dieu qui laisse la main à un persécuteur, est aussi celui qui établira son règne au moment qu’il aura choisi.

Laissant donc de côté une discussion critique, qui serait sans résultat, sur les origines et les destinées du livre, nous le prenons comme un tout. Ignoré jusqu’au moment de la crise syrienne, il éclate comme une lumière très vive, la même lumière que projetaient les prophètes, mais sur des objets nouveaux, de sorte qu’il fut vraiment une révélation nouvelle, montrant sous un nouvel aspect le règne de Dieu et celui qui en sera le Chef.

Jusqu’alors la prophétie se manifestait dans des circonstances particulières, et visait un horizon restreint. Son but était déjà d’exciter les Israélites à l’obéissance envers leur Dieu, et elle ne manquait pas de fonder cette obéissance sur son droit absolu, qui s’exerçait même sur les autres nations. C’est ainsi que Moïse avait montré dans la sortie d’Égypte un triomphe de Iahvé, Dieu d’Israël, sur l’endurcissement du Pharaon.

Le Pharaon n’avait été que récalcitrant. Sennachérib avait insulté le Dieu d’Israël. Il l’avait positivement mis au rang des dieux qu’il avait vaincus, et il espérait bien le vaincre aussi. L’invasion assyrienne n’était donc pas seulement le fruit de l’ambition, une guerre de conquêtes engagée au hasard des intérêts politiques et économiques, c’était déjà une guerre religieuse. Pour bien établir qu’il avait été le vainqueur, Dieu avait frappé les Assyriens sans le concours des armes du roi de Juda.

La crise syro-macédonienne créa un autre état du conflit.

Dans les vieilles guerres, les Israélites n’avaient chance de vaincre que s’ils s’étaient repentis ; il fallait donc qu’ils se reconnussent coupables. Cependant ils l’étaient moins que leurs oppresseurs, et se sachant la