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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/121

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aborder en Attique. Mais les dieux de l’Attique étaient trop mêlés à la nature, trop semblables à ceux qui les avaient conçus. L’apocalyptique avait du moins un sentiment religieux élevé, elle tendait vers l’infini ; dans son cauchemar il y avait une poursuite de Dieu.

Pourquoi chercher ? Nous avons la simplicité et le naturel de l’Évangilet si sûr de posséder Dieu.


§ 2. L’esprit et les doctrines de l’apocalyptique.


Tout ce que nous avons dit du genre littéraire de l’apocalyptique découle de ce fait que l’auteur n’est plus, comme le prophète, un homme d’action qui applique la parole de Dieu à des circonstances actuelles, mais un voyant envisageant les choses exclusivement en vision et les exprimant par des images qui souvent ne sont que des symboles. Ce voyant étant censé un homme du passé le plus lointain, les allusions à l’avenir, déjà fréquentes chez les prophètes, sont devenues l’objet propre de l’apocalyptique, si bien qu’elle affecte de traiter les événements les plus reculés du passé sous les apparences du devenir.

Les objets sont donc présentés sous une forme où l’imagination l’emporte sur l’observation. Sont-ce bien les mêmes objets ? Ils n’ont pas changé substantiellement, puisque ce sont toujours Dieu, le monde, les nations, Israël en particulier, et que les rapports essentiels entre Dieu et l’homme ne cessent pas d’être ceux du maître et du serviteur. Mais les événements ont amené des préoccupations nouvelles. La scène du monde a été transformée, et puisque l’auteur est un spectateur, qui est changé lui-même, il n’a pas vu les choses dans le même état, ni avec le même esprit.

Nous l’avons jugé, comme auteur, comme littérateur, si l’on peut dire, insensible à l’influence des Grecs. Leur génie ne s’est pas refusé même au grotesque, même à la Chimère : ils ne s’y sont pas complus, revenant toujours à l’imitation de la nature et de ses lois, dont les voyants se souciaient si peu. Pourtant il semble qu’Israël n’a pu se dérober à l’action des idées nouvelles et des sentiments qui étaient désormais le patrimoine commun de toutes les classes dans les royaumes issus de la conquête d’Alexandre. Quand les cités les plus fières, même Athènes, même Sparte, renonçant à se disputer une hégémonie restreinte, perdaient leur autonomie sous une domination plus vaste, Israël devait cesser de concentrer ses vues sur les Philistins, sur Moab et sur Édom. L’unique idéal des âmes les plus nobles, la gloire de la cité, ne régnait plus sans conteste depuis que Platon, élève de Socrate, avait mis plus haut encore l’idéal de la justice, même méconnue, même bafouée, même mise au gibet. Les Juifs devaient donc être amenés aussi à reconnaître une nouvelle catégorie