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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/174

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avaient échauffé les esprits. Alexandre aviva la plaie en vengeant l’outrage reçu par le massacre de six mille hommes, disait-on[1].

Aussi lorsque, vaincu par le roi des Nabatéens Obodas, il revint à Jérusalem en fuyard, la révolte éclata. Il eut cependant assez de crédit pour grouper à son service quelques-unes de ces bandes de mercenaires qui erraient d’un royaume à l’autre, et avec ces étrangers il fit à son peuple une guerre si dure qu’il périt, disait-on, cinquante mille Juifs. Vaincu, néanmoins, réduit à implorer la paix, on lui signifia que l’unique condition serait sa mort. Comme ils connaissaient son adresse à se relever et ses ressources, les Pharisiens recoururent au roi de Syrie, alors en bonne situation, Démétrius III Euchaerus. A ce coup Alexandre dut s’enfuir dans les montagnes, comme les Macchabées ses ancêtres. Étrange renversement ! Le parti des sectateurs rigides de la Loi s’unit aux Grecs idolâtres pour achever la ruine d’un descendant des Macchabées ! Si les historiens modernes s’en étonnent, les Juifs eux-mêmes en furent émus. Un grand nombre quitta les rangs de l’armée syrienne. Déméfrius, se croyant dupé, rentra chez lui, Alexandre fut assez fort pour s’emparer à Bethomé de ses principaux adversaires. Josèphe dit qu’il en fit crucifier huit cents. Durant leur lente agonie, il fit massacrer sous leurs yeux leurs femmes et leurs enfants[2] ; lui-même jouissait de ce spectacle en faisant joyeuse chère avec des courtisanes.

A ce prix il fut tranquille à l’intérieur durant les douze dernières années de son règne. Huit mille de ses adversaires s’étaient exilés.


§ 3. — Alexandra (76-67).


Jannée, épuisé depuis trois ans par une maladie qu’on attribuait à son intempérance, eut encore l’énergie de mettre le siège devant Ragaba, au delà du Jourdain[3]. Au moment où la ville était aux abois, lui-même se sentit mourir. Sa femme Alexandra, qui lui avait assuré le trône, se lamentait, se sentant impuissante à dompter les Pharisiens, farouches ennemis du roi. Celui-ci lui conseilla de se réconcilier avec eux, de leur promettre de ne rien faire dans le royaume sans demander leur avis, de s’en remettre à eux pour le soin de ses propres funérailles[4].

  1. Ant., XIII, xiii, 5.
  2. Ant., XIII, xiv, 2.
  3. Probablement Radjib, sur les bords du torrent du Iabbok (Nahr ez-Zerqû).
  4. Le Talmud raconte la monition du mourant à sa manière oblique, en évitant de nommer les Sadducéens et en déchargeant les Pharisiens des reproches de Jannée : « Ne crains ni les Pharisiens, ni ceux qui ne le sont pas, mais crains les hypocrites qui affectent une ressemblance avec les Pharisiens », etc. (Derenbourg, p. 101). Cela n’a plus rien de concret et n’aboutit à rien. Dans Josèphe (Ant. XIII, xv, 5) : les Pharisiens étaient « des hommes influents auprès des Juifs, capables de nuire à ceux qu’ils haïssaient et de servir ceux qu’ils aimaient ; ils rencontraient grand crédit auprès de la foule, même pour les calomnies que leur dictait l’envie ; lui-