Aller au contenu

Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Babylone, nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion[1].

Ces heureux temps étaient-ils passés à jamais ? Non, puisque ces mêmes prophètes qui avaient prédit la ruine en suite de l’infidélité, avaient annoncé des jours plus glorieux encore, dans les douces effusions de la tendresse de Dieu reconquise. Il avait aimé la fille d’Israël comme une épouse. Dans le désert s’étaient conclues de mystérieuses fiançailles.

L’entrée en la terre promise avait été la dot de l’épousée. Quel serait le retour, après une nouvelle période de solitude pour échanger de nouveaux serments : « Car je l’attirerai, et la conduirai au désert, et je lui parlerai au cœur ; et de là je lui donnerai ses vignes, et la vallée d’Achor comme une porte d’espérance ; et elle répondra là comme aux jours de sa jeunesse, et comme au jour où elle monta hors du pays d’Egypte. Je te fiancerai à moi pour toujours je te fiancerai à moi dans la justice et le jugement, dans la grâce et dans la tendresse ; je te fiancerai à moi dans la fidélité, et tu connaîtras Iahvé[2].

Beaucoup de chrétiens n’ont jamais lu ces paroles. Elles ont été écrites pourtant par le prophète Osée. Où trouver dans l’antiquité des accents aussi pénétrants, aussi dignes de la miséricorde de Dieu ? Oh ! l’attrait de cet appel lointain sur des captifs déportés, mangeant avec amertume le pain de l’exil, tristes et rebutés aux jours des fêtes de leurs vainqueurs ! Quel contraste entre leur Dieu, le Dieu de leurs pères et ces dieux et déesses, artisans de leurs malheurs, couronnés d’or, vêtus de pourpre, l’épée à la main, mais idoles impuissantes à se préserver des hiboux et des chauves souris[3] !

Mais pouvait-on espérer que Iahvé tiendrait sa promesse ? Vaincu chez lui, serait-il assez puissant pour jeter à bas cette grande Babylone, nouvelle Babel plus formidable que celle dont Iahvé n’avait eu raison qu’en confondant les langues de ses bâtisseurs ?

Les regrets douloureux, les vagues espérances du peuple furent encouragés par les prophéties les plus claires sur la manière dont serait accompli le salut.

Israël avait été puni. Plus coupable, Babylone ne devait pas être épargnée. Jérémie avait fixé une date : « Et lorsque les soixante-dix ans seront accomplis, je ferai rendre compte de leur péché au roi de Babylone et à cette nation, — oracle de Iahvé, — et au pays des Chaldéens, et j’en ferai des solitudes éternelles[4].

  1. Ps. cxxxvii, 1
  2. Os., ii, 16-22.
  3. Lettre de Jérémie, vi, 10.
  4. Jér., xxv, 12 ; xxix, 10.